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<< C'était un homme qui s'appelait Davy , 

 Il était né dans le Tennesseeee . . . >> 

 Qui , de nos jours , se souvient de cette rengaine , << La ballade de Davy Crockett >> ? Refrain lancinant , paroles niaises autant en anglais ( 20 couplets dans cette langue , pas moins ! ) qu'en français ( adaptées , pour la petite histoire , par le grand humoriste Francis Blanche , si , si ! ) , et carrément insupportable par sa mièvrerie , surtout chantée par Annie Cordy !!!

Même gamin , elle me cassait royalement les oreilles . . . Et pourtant  . . . de 1954 à 1955 , près d'un million d'exemplaires vendus aux Etats-Unis ! Ceci , peut etre du au fait qu'elle fut , à l'origine , interprétée par l'acteur qui incarnait le héros de la frontière dans le film éponyme de Walt Disney , avec une belle voix de baryton , et à l'accent très << country >> . .

Cet acteur s'appelait Fess Parker , et , anecdote savoureuse , la consonance en langue française , quelque peu spéciale de son prénom fit que les distributeurs du film durent changer le dit prénom , sur les affiches et dans les rubriques cinématographiques , en un improbable . . . Fier Parker . . . Stupidité crasse due à l'ssprit tordu et mal placé de la censure . . .

C'est par ce film , plus deux suites et un mini feuilleton , tous dus au studios Walt Disney , que le célèbre trappeur  fit son entrée en Europe , et fût bien approuvé du public , mais moins qu'aux States , bien sur . Il y eut un boom de Crockettmania relativement bref ( =/- 15 mois ) , mais fulgurant : le << merchandising >> du film , pour employer un terme d'actualité , n'eut pratiquement pas de limites : on vendit de tout sous le label Crockett : vêtements de peau ( pour enfants et adultes ) , brosses à dents , montres , cartes , images , chewing-gum , lampes de poche , mocassins , portefeuilles , garnitures de lit et jouets . . . Sans oublier le célèbrissime bonnet de fourrure à queue de raton laveur , et la liste n'est pas exhaustive , loin s'en faut . 

 

Chiffres d'affaires : 300 millions de dollars en un an !!! Tonton Walt a été un précurseur , son digne successeur étant , 20 ans plus tard , Georges Lucas , présentement multimilliardaire en dollars grace aux produits dérivés de la saga Star Wars , comme chacun sait . . . 

 

Dans les années soixante , sortit le très connu << The Alamo >> , avec John Wayne dans le role de Crockett , mais toute ressemblance avec le modèle et le << Duke >> se limite à leur capacité et leur propension à lever le coude . . . N'y voyez là aucune malignité de ma part , mais , d'un coté les deux gaillards étaient loin d'être des anges , et d'un autre , le film est une grosse machinerie ennuyeuse qui fait plus qu'égratigner la vérité historique .  

Pardonnez moi ce préambule plus ou moins longuet , mais j'estimais cela digne d'intérêt , étant donné qu'à l"époque , on n'avait que peu d'informations sur  l'Histoire des Etats-Unis , et , à part quelques initiés , le personnage qui nous interesse n'était pas connu , et ne le fut , au départ , que par le biais cinématographique . 

Et puis je me dois de le signaler que nombre d'histoires , plus ou moins vraies ( mais plutot moins que plus . . . ) ont couru sur notre homme : déja de son vivant , par la suite , et encore au cours de ses péripéties sur pellicule : en fait , il fût plus la victime que le bénéficiaire de sa réputation , basée , déja bien avant sa disparition , sur des anecdotes , des on-dits ) , des racontars ou des descriptions fantaisistes et fortement exagérées de ses exploits .

Je ne citerais , avant d'entamer sa biographie , que ce fait << héroîque >> rapporté à son sujet ( et repris , allégrement , dans le film , mais c'est du Disney ) : il se serait amusé , et ceci plusieurs fois , à . . . hypnotiser un ours , simplement en le fascinant avec son sourire , avant de le maîtriser à mains nues , puis de le terrasser à coups de poignard !!! . . . Oufti ! comme disent les Liègeois ! Un vrai 13eme travail d'Hercule ! Bon , vous voyez ce que je veux dire , en parlant d'exagération : le soleil du Tennessee vaut bien celui de Marseille . . .

A noter que son histoire authentique nous réserve une première surprise : Davy Crockett est d'origine . . . normande

Eh oui , son ancêtre , huguenot émigré en Irlande à cause de la révocation de l'Edit de Nantes sous Louis XIV s'appelait Antoine de Crocketagne . . . 

Le troisième fils d'Antoine , Joseph , part pour l'Amérique à la fin du XVIIeme siècle . Il aura un fils , William , qui sera l'arrière grand-père de notre héros . 

On ignore totalement quand les Crocketagne anglicisèrent leur nom . On retrouve donc les Crockett , vers 1750 , en Californie du Nord . Le premier Davy Crockett , le grand-père , et son épouse , sont tués par les Indiens Creek et Cherokee en 1778 . 

David voit le jour le 17 aout 1786 . Il est le cinquième d'une fratrie de neuf enfants ( 5 frères et 3 soeurs ) . A cette époque , les Crockett sont une famille de pionniers , indépendants et vivants par ses propres moyens . Les temps sont difficiles , les combats entre Indiens et Blancs sont incessants , la cupidité et la convoitise de ces derniers envers les terres des Peaux-Rouges n'y sont pas étrangères . . . Pour subsister , il y a la chasse , la culture , un peu de pêche . . . Quand Davy atteint l'age de neuf ans , son père construit et se met à exploiter une petite taverne sur la route Knoxville -Abington . Jusqu'à cette période et après , les enfants n'ont pu recevoir aucune éducation scolaire , si bien qu'à douze ans , Davy est totalement analphabete ... Son père le place à l'école Benjamin Kitchen , ou il restera. . .quatre jours ! En effet , après une bagarre avec un condisciple , craignant les foudres paternelles , il s'enfuit et part à l'aventure ; ce qui convient tout à fait à son caractère , puisqu'il a déja été abondamment nourri des histoires et récit de voyage de clients de passage de son père.  Il travaillera pour des routiers , des fermiers , un chapelier . . . Mais aucun emploi ne le satisfait réellement et , après deux ans et demi , il réintègre le foyer. Son père le fait alors engager par deux fermiers dont il est le débiteur . A presque 16 ans , Davy a mûri , et de mentalité , et physiquement : c'est maintenant un solide jeune homme de près d'un mètre quatre-vingts , qui connait déja bien la nature . Au cours de ses loisirs , il emprunte souvent le fusil de son employeur , et devient très rapidement un tireur émérite , sinon d'élite , car , prenant part à des concours de tir , il est régulièrement le gagnant , arrivant à se payer des vêtements neufs , un cheval et son propre fusil , en revendant ses prix ( le plus souvent des quartiers de boeufs ! ) ; il faut savoir qu'il lui arriva , à maintes reprises , de remporter tout les quartiers de boeuf ( 4 pièces de viande par concours ) ! Il fréquente aussi l'école locale , afin de se scolariser un peu , mais ses progrès sont lents . Il laissera bientot tomber cet embryon d'études . 

Le 12 aout 1806 , il épouse Mary Finley , surnommée Polly , qui lui donnera trois enfants , avant de décéder prématurément en 1815 . 

Toujours aussi peu instruit , il est cependant devenu un fameux chasseur et habile trappeur , ravitaillant les habitants des villages des produits de sa chasse , ce qui lui permet de faire vivre sa famille fort décemment . 

L'Histoire suivant son cours , les colons vont toujours plus loin . Davy Crockett décide de les suivre en 1811 . Point n'est besoin de repréciser que les colons sont pour la plupart des aventuriers rustres et illetrés . Courageux , cependant , car la vie est précaire et dangereuse , et il faut faire face , non seulement aux combats presque quotidiens contre les Indiens , mais aussi aux repris de justice fuyant les lois d'un autre état . 

Davy va cumuler plusieurs fonctions : fermier , trappeur , défricheur , chasseur . . . Chasseur de gibier mais aussi d'hommes , car il faut assurer la sécurité contre les Peaux-Rouges et les bandits . La tension augmente dès 1812 : les Creeks sont de plus en plus spoliés et volés par les Américains . Les Anglais , en guerre contre ces derniers , en profitent pour armer les Indiens , qui se déchainent alors contre les pionniers . Crockett rejoint les volontaires pour lutter contre les Creeks . Durant cette guerre qui se déroulera de 1813 à 1814 , il est commandant d'un bataillon, avec le grade de colonel . 

C'est en 1821 , qu'il rejoint la politique , devenant d'abord membre de la Législature du Tennessee , de 1823 à 1824 , ensuite membre du congrès de 1824 à 1829 , reconduit de 1829 à 1831 , et une ultime fois de 1833 à 1835 . 

Pour un << gars de la nature >> , c'est un exploit hautement méritoire ! D'autant plus qu'il n'hésitera pas à paraitre au Congrès dans sa célèbre tenue de trappeur en peau de daim , coiffé de son non moins célèbre bonnet , et chaussé de ses mocassins , récoltant un franc succès ! 

Mais justement , plus proche de la nature que des hommes , il est d'une naiveté , d'une candeur qui vont le désservir , et il sera le jouet des politiciens professionnels , maitres es roueries et tromperies qui lui font face . 

Notons au passage , qu'en 1830 , il s'insurge et vote contre une loi assignant les Indiens dans une réserve à l'Ouest du Mississippi . Traiter cette loi << d'infâmie >> comme il l'a fait est assez paradoxal , si l'on se rappelle qu'il est intervenu dans nombre d'opérations contre ces mêmes Indiens , et avec des intentions peu humanitaires ! Mais on ne saura jamais la raison de ce revirement . 

En 1835 , il est battu aux réélections , et se déclare dégouté à jamais de la politique . 

Fidèle à sa devise << Soit toujours sur d'avoir raison , et alors , fonce ! >> , il prend la décision de partir pour El Alamo , au Texas , avec quelques compagnons (dont Jim Bowie , le créateur du célèbre << Bowie-Knife >> ) afin de tenter d'aider les Texans dissidents à secouer le joug du tyran mexicain , le Général Santa Anna . Son << glorieux régiments des Volontaires Montés du Tennesse >> se compose de . . . 11 hommes ! 

En cours de route , ils ne feront que boire et ripailler : il semblerait que , conscients de la destinée qui les attends , à savoir une lutte perdue d'avance , ils soient désireux de vivre intensément une dernière fois , de << bruler leurs vaisseaux >> , dans une ultime et dérisoire jouissance . . . 

Car , bien sur , c'est la mort qui sortira victorieuse de ce baroud d'honneur . . . D'honneur , il est en effet question , dans le sens le plus guerrier du terme : à la fin de la bataille du fort d'El Alamo , 187 assiégés gisent dans la poussière et les gravats . . . Mais dans les rangs mexicains , on dénombre plus de deux milles morts  ! Davy Crockett et ses braves ont vendus très chèrement leur vie . . . 

Et c'est à ce prix , c'est en se battant jusqu'au bout dans ce minuscule bastion que le grand trappeur , l'idéaliste charismatique et hautement estimé de ses concitoyens , l'homme rude et tendre à la fois , affiné aux choses de la nature , mais désarmé devant la perfidie des hommes  , va entrer dans la légende . . . 

 

 

 

 

El Alamo aujourd'hui 

Sur sa pierre tombale , on peut lire : << Davy Crockett , Pionnier , Patriote , Soldat , Trappeur , Explorateur , Législateur d'Etat , Membre du Congrès , Martyr à El Alamo . 1786- 1836 >> 

Son fusil appellé << Betsy >> est au musée de Nashville . Son tomahawk se trouve à l'institut Smitsonian à Washington D.C. 

Monument des défenseurs d'El Alamo , San Antonio , Texas , avec Davy Crockett au centre .

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